Les démarches à effectuer après un décès en Turquie
Ce guide a été rédigé pour accompagner les francophones ayant perdu un proche en Turquie. Il présente les étapes essentielles à suivre selon le droit turc. Rédigé par Nazım Kaan Demir, avocat francophone en Turquie, il vise à simplifier les démarches à effectuer après un décès en Turquie
Obtention de l’acte de décès en Turquie
La première démarche officielle à effectuer après un décès en Turquie est l’obtention de l’acte de décès. Ce document est indispensable pour constater et enregistrer légalement le décès.
En Turquie, si le décès survient à l’hôpital, l’acte de décès est établi par l’établissement hospitalier. En revanche, si la personne décède en dehors d’un établissement de santé, le document est délivré par les équipes médicales intervenues sur place ou par le médecin de famille.
Une fois l’acte de décès rédigé, l’inscription du décès est effectuée par la direction de l’état civil dont dépend la personne décédée. Ce n’est qu’après cette formalité que les démarches liées au droit des successions peuvent être engagées.
Obtention du certificat d’hérédité (acte de notoriété successorale)
Une fois l’acte de décès établi, il est nécessaire d’obtenir un certificat d’hérédité afin de procéder au partage de la succession. Ce document est indispensable pour faire valoir les droits successoraux.
Le certificat d’hérédité (en turc veraset ilamı) est un document officiel qui identifie les héritiers légaux du défunt. Il permet de déterminer les droits de chacun sur la succession, selon les parts indiquées dans le document.
Il peut être délivré soit par le tribunal de paix (sulh hukuk mahkemesi), soit par un notaire. La demande peut être présentée par l’ensemble des héritiers ou par un seul d’entre eux.
Les documents suivants doivent être fournis lors de la demande :
- L’acte de décès (original ou copie certifiée conforme)
- Une copie des pièces d’identité
- Un extrait d’état civil
- Le paiement des frais de délivrance et de timbre fiscal
Le certificat indique l’identité des héritiers ainsi que la quotité de leurs parts dans la succession. En revanche, il ne contient pas de mention sur les biens ou avoirs du défunt. En cas de désaccord sur les parts mentionnées, un recours judiciaire est possible pour en contester le contenu.
Sans ce document, il est impossible de procéder au partage des biens, aux démarches auprès du cadastre ou à la récupération des avoirs bancaires du défunt. Le certificat d’hérédité constitue donc une étape incontournable de la procédure successorale en Turquie.
Transfert de propriété et autres biens (dévolution successorale et déclaration au fisc)
Une fois l’acte de décès et le certificat d’hérédité obtenus, il convient d’engager les démarches de dévolution successorale.
Selon le droit turc, les biens du défunt sont transmis aux héritiers par le principe de succession universelle, ce qui signifie que l’ensemble du patrimoine est transféré de plein droit. À cela s’ajoute le principe de transfert automatique, selon lequel les héritiers acquièrent les biens sans qu’aucune déclaration de volonté ou formalité supplémentaire ne soit nécessaire.
Les héritiers qui n’ont pas renoncé à la succession doivent déclarer le décès auprès du bureau des impôts dans un délai d’un mois à compter de la date du décès. Cette déclaration peut être effectuée par un seul héritier au nom de tous.
Après l’obtention du certificat d’hérédité, les héritiers doivent engager les démarches de transfert concernant les biens enregistrés au nom du défunt : biens immobiliers, véhicules, comptes bancaires, actions et autres actifs.
Pour le transfert des biens immobiliers, une demande doit être faite auprès de la Direction du Cadastre (Tapu Müdürlüğü), accompagnée du certificat d’hérédité, d’un document indiquant la valeur municipale du bien (rayiç bedel) délivré par la mairie, ainsi que de la déclaration fiscale de succession.
Les institutions telles que les banques, les registres des véhicules ou autres organismes concernés exigent également cette déclaration fiscale et le certificat d’hérédité pour procéder aux transferts. Le paiement de l’impôt sur les successions est indispensable, sans quoi aucun transfert ne pourra être effectué.
Impôt sur les successions et déclaration de dévolution successorale
L’impôt sur les successions concerne les transferts de patrimoine après le décès d’une personne, tandis que l’impôt sur les donations s’applique aux transferts de biens effectués entre personnes vivantes à titre gratuit.
En Turquie, cet impôt est obligatoire et doit impérativement être acquitté pour que la succession puisse être officiellement transférée aux héritiers. À cette fin, une déclaration de succession et de transfert doit être dûment remplie et déposée. Elle doit être exacte et complète. L’obtention préalable d’un certificat d’hérédité est nécessaire pour pouvoir effectuer cette démarche, document délivré par un notaire ou par le tribunal de paix (sulh hukuk mahkemesi).
Le délai de dépôt de la déclaration dépend des circonstances:
- Si le décès a eu lieu en Turquie: dans les 4 mois suivant le décès
- Si le décès a eu lieu à l’étranger: dans les 6 mois
- En cas de déclaration d’absence (gaiplik), dans le mois suivant la décision définitive du tribunal
Le non-respect de ces délais peut entraîner des sanctions importantes : pénalités fiscales allant jusqu’à 100%, intérêts de retard, blocages au cadastre ou lors des démarches bancaires.
Renonciation à la succession (refus d’héritage)
Toute personne n’est pas obligée d’accepter l’héritage qui lui revient. C’est pourquoi le droit turc prévoit la possibilité de renoncer à la succession, sous certaines conditions, conformément aux dispositions du Code civil turc.
La renonciation peut être expresse (réelle) ou présumée (légale).
La renonciation expresse se fait par une déclaration écrite déposée auprès du tribunal de paix (sulh hukuk mahkemesi) dans un délai de trois mois à compter du moment où l’héritier a connaissance de l’existence de la succession. Il s’agit d’une procédure non contentieuse. Ce délai est de rigueur : s’il est dépassé, l’héritier est considéré comme ayant accepté la succession et devient responsable des dettes éventuelles.
La renonciation présumée, prévue à l’article 605 du Code civil turc, intervient automatiquement lorsque l’insolvabilité du défunt au moment du décès est manifeste ou officiellement constatée. Dans ce cas, l’héritier est réputé avoir refusé la succession.
Pour faire valoir cette présomption, une action judiciaire doit être engagée devant le tribunal de grande instance (asliye hukuk mahkemesi), en indiquant les créanciers du défunt comme parties adverses.
La renonciation à la succession doit être totale, inconditionnelle et indivisible. Il n’est pas possible de n’accepter qu’une partie de l’héritage.
Déclaration auprès de l’Institut de la Sécurité Sociale (SGK)
Le conjoint ou les enfants du défunt peuvent percevoir sa pension de retraite en en faisant la demande auprès de l’Institut de la Sécurité Sociale (SGK) en Turquie. Pour que cette pension de réversion soit accordée, les conditions prévues à l’article 32 de la Loi n° 5510 doivent être remplies.
Si les conditions légales sont réunies, la demande peut être faite directement par le conjoint ou les enfants majeurs et capables, ou par leur représentant légal ou avocat. Dans ce cas, la pension de retraite du défunt est attribuée aux ayants droit désignés.
Transfert de propriété immobilière (intégration au registre foncier)
Les démarches de transfert de propriété immobilière auprès du registre foncier peuvent s’avérer longues et complexes. Une attention rigoureuse permet toutefois de gagner un temps précieux.
Pour que le transfert soit effectué, les conditions suivantes doivent être remplies :
- Dépôt préalable de la déclaration fiscale de succession
- Présentation du certificat d’hérédité
- Régularisation d’éventuelles dettes fiscales ou arrangements de paiement
En l’absence de litige entre héritiers, la procédure peut généralement être finalisée en quelques semaines. En revanche, tout désaccord peut entraîner une procédure judiciaire, ce qui rallonge considérablement les délais.
Tant que les démarches auprès du cadastre ne sont pas terminées, aucune vente du bien immobilier n’est possible.
Conclusion
Les démarches à effectuer après un décès impliquent non seulement une charge émotionnelle, mais aussi des procédures juridiques rigoureuses. Il est essentiel de préparer les documents sans erreur et de respecter les délais afin d’assurer le bon déroulement des formalités. En l’absence d’un accompagnement juridique, les procédures risquent d’être interrompues ou retardées. C’est pourquoi il est fortement recommandé de faire appel à un avocat francophone basé à Istanbul pour un accompagnement fiable et adapté.
Adv. Nazım Kaan Demir
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